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Ludovin

La biodynamie, des mythes à la réalité


La biodynamie n’est pratiquée que sur 1,4 % du vignoble français. Mais des domaines célèbres l’ont adoptée.


Ensemble de pratiques de bon sens pour les uns, démarche spirituelle pour les autres, absurdité contre-scientifique aux yeux des plus réticents… La biodynamie clive mais gagne du terrain. Un siècle après sa naissance, exploration d’un phénomène influent dans le vignoble.


Si le chiffre 501 vous fait penser à une coupe de jean ou un modèle de voiture italienne, c’est que vous n’êtes pas un vigneron biodynamiste. Sinon, vous auriez immédiatement associé ce chiffre à une corne de vache emplie de quartz, enterrée à l’équinoxe d’automne et déterrée au printemps afin que son contenu soit dilué dans de l’eau, brassé dans un dynamiseur , puis pulvérisé dans les vignes… à 4 heures du matin !

« Il s’agit de vitaliser de la lumière contenue dans le quartz par des forces solaires, la corne recevant pendant deux ou trois années après son prélèvement les forces du soleil », assure Nicolas Joly, célèbre vigneron de la Coulée de Serrant. Bienvenue dans un monde qui tantôt amuse, tantôt agace ou fascine, mais qui toujours interpelle : celui de la biodynamie.


Qu’est-ce que la biodynamie ?

Elle désigne un modèle agricultural fondé sur la conviction que la Terre est un être vivant. À l’appui d’un socle agronomique ordinaire (rotations longues, travail modéré du sol, compostage des matières organiques…), la biodynamie ajoute des pratiques spécifiques articulées autour de trois grands principes : la conception du domaine comme un organisme agricole autonome, l’utilisation des “préparations biodynamiques” (plantes médicinales, bouse de vache, quartz…) et la prise en compte des “rythmes cosmiques”, c’est-à-dire les influences qu’exerceraient le soleil, la lune, les planètes et le zodiaque. Avec la 501, la 500 (la corne de vache est cette fois emplie de bouse) et la “Maria Thun” (ou MT, compost de bouse) sont les trois préparations biodynamiques les plus fréquentes.


  • Rudolf Steiner (1861-1925), l’inventeur de la biodynamie La biodynamie est née dans l’esprit de Rudolf Steiner (1861-1925), intellectuel autrichien controversé à la production foisonnante, qui s’est intéressé aussi bien à l’agriculture et à l’éducation qu’aux sciences occultes. Il est le père de l’anthroposophie, mouvement teinté de religiosité qui prétend mettre l’homme en communication avec son environnement. « Steiner attribue à l’humain une capacité de médiation avec des entités autres que lui-même, qu’elles soient végétales ou animales », résume l’anthropologue Christelle Pineau dans son livre La Corne de vache et le microscope (éditions La Découverte, 2019). Steiner évoque même des médiations avec des êtres légendaires (elfes, gnomes). Ce courant de pensée influence toujours des secteurs aussi divers que la finance (banques Triodos et GLS), l’éducation (écoles Steiner-Waldorf) ou l’homéopathie (laboratoires Weleda). Son application à l’agriculture remonte au “Cours aux agriculteurs”, prononcé sous forme de conférences en 1924, l’acte de naissance de la biodynamie. Mais les agriculteurs et les vignerons qui la pratiquent en 2020 ne conservent souvent que les conseils concrets, écartant les aspects ésotériques. Ajoutons que Steiner n’a jamais eu le plaisir de déguster un vin biodynamique… ni tout autre vin : il était abstinent !


Comment s’est-elle diffusée en France ?

La biodynamie se développe après la Seconde Guerre mondiale, dans des fermes céréalières, en réaction au développement de la mécanisation, des pesticides et du modèle intensif. Dans le vignoble, elle trouve une porte d’entrée en Alsace chez Eugène Meyer, en 1969. À partir des années 80, le vigneron ligérien Nicolas Joly en devient un porte-étendard médiatique. Via son association Renaissance des Appellations, qui rassemble des vignerons internationaux certifiés en bio et en biodynamie, il organise des dégustations et des séminaires dans le monde entier.


Les conversions se multiplient dans les années 90, sous l’impulsion de deux conseillers influents, François Bouchet et Pierre Masson, qui accompagnent de nombreux vignerons dans cette démarche. Aujourd’hui, des figures aussi diverses que l’Alsacien Olivier Humbrecht (président de Biodyvin), le Jurassien Jean-François Ganevat ou le Corse Jean-Charles Abbatucci contribuent par la qualité de leurs vins à attirer de nouveaux domaines dans cette voie...

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